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Sword of Doom
Sugata Sanshiro 1
Sugata Sanshiro 2
Les 47 Ronins 1
Les 47 Ronins 2
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Trente cinq ans après sa réalisation, Sword of Doom apparaît
plus que jamais comme l'un des joyaux du chambara

....Cette atmosphère d'angoisse sur-aigüe traduisait naturellement celle de la société japonaise traumatisée par les conséquences immédiates de l'industrialisation: le renforcement du pouvoir des puissants Zaïbatsus (trusts) et de leurs alliées militaires, et surtout, les longues files de chômeurs et de déclassés qui s'allongeaient dans les rues.
Il est aujourd'hui difficile de ne pas interprêter l'oeuvre de Nakazato comme un trait de génie prémonitoire sur la folie guerrière qui allait embraser le peuple japonais et le jeter au cours des années 30 dans une triste série de conquêtes jalonées de carnages.

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....Alors que le psychopathe Ryunosuke Tsukue a été l'emblème littéraire des terreurs de la démocratie Taisho (1912-1926), le très positif Miyamoto Musashi cristallise les faibles espoirs humanistes des sombres années 30 et 40. La paix revenue, Tsukue et sa pulsion de mort reviennent défier Musashi. Trois grandes adaptations ont marqué le myhe de Tsukue dans le cinéma samourai d'après guerre. La première fut celle de Tomu Uchida (né en 1897), célèbre pour avoir déserté l'armée japonaise en 1941, pour partir s'engager dans l'armée rouge de Mao. Quitte à mourir à la guerre, autant la faire du côté des agressés plutôt que celui des envahisseurs. Déjà connu comme réalisateur de drames révolutionnaires tels que l'Oiseau Bleu (1936, interdit par la censure) ou Earth (1940), Uchida a survécu à la guerre sino-japonaise.

Le Passage du Grand Bouddha

....Au début des années 20, nombre de jeunes intellectuels diplômés des grandes écoles arrivent dans les studios. Enfants, ils applaudissaient aux exploits des super samourais interprêtés par Matsunosuke Onoe.
Jeunes adultes, ils s'attachent à enrichir les mythes de leur proche enfance, à la lumière de la littérature et de la philosophie occidentale qu'ils venaient de découvrir dans le cadre de leurs études.

En 1923, Rokuhei Susukita, dans son scénario Marasaki Zukin donne le jour à un nouveau type de héros: le jeune samouraï rebelle, cynique et tourmenté. ..Pour la mise en scène des combats, le réalisateur B
ansho Kanamori dépasse les rigides chorégraphies en plan séquences héritées du Kabuki, préférant s'inspirer de l'action rapide et du montage serré du cinéma américain. Les critiques saluent le hors-la-loi nihiliste de Susukita.

....L'année suivante, une nouvelle star monopolise le devant de la scène en incarnant de jeunes sabreurs révoltés, proches du modèle de Susukita: Tsumusaburo Bando. Sa popularité ne baissera pas au cours des vingt années qui suivent. Cette innovation cinématographique avait une origine littéraire: en 1920, triompha sur une scène de théâtre (moderne et non Kabuki) une adaptation des premiers épisodes d'un roman fleuve intitulé Daibosatsu Toge (en français, Le Passage du Grand Bouddha), oeuvre unique mais volumineuse (30 volumes en tout entre 1913 et 1930) de l'écrivain Kaizan Nakazato, qui se définissait lui-même comme le disciple mystique de Victor Hugo.

....Son héros, Ryunosuke Tsukue, ronin rebelle et incompris, assoifé de vengeance, devient aveugle et pris d'une rage meurtrière, massacre ennemis et innocents avant de sombrer dans la folie au milieu du déchaînement des forces de la nature.
Tsukue
est un prototype sulfureux de Kyoshiro Nemuri, ainsi que du futur démon Itto Ogami, l'éxecuteur impitoyable de la saga Kozure Okami (Baby Cart). Tsukue, un ronin psychopathe, met son extraordinaire habileté d'escrimeur au service d'une arrogance pathologique qui le pousse à provoquer sans cesse les champions des plus grandes écoles en des combats systématiquement mortels.

Les scènes les plus remarquables: un tournoi votif dans un temple, une embuscade à dix contre un dans une forêt profonde, une autre rencontre du même type dans une ruelle enneigée, et un déchaînement apocalyptique dans les derniers instants.

Après douze ans d'exil, il retourna au Japon, où il s'affirma comme un maître du chambara violent, lyrique, et non dénué d'humour avc des films tels que Bloody Spear at Mont Fuji (1955), Le Passage du Grand Bouddha (1957) et surtout Zen and Sword (1961-63), une intéressante adaptation du Musashi de Yoshikawa reprenant des scènes entières du film d'Inagaki en y rajoutant des combats beaucoup plus sanglants.

Chez Uchida, Tsukue est incarné par le vétéran Chiezo Kataoka. Viendra ensuite la version de Kenji Misumi de 1961-1962 qui fera de Raizô Ichikawa l'alter ego de Toshiro Mifune au box office nippon.
La précision du cadre et du montage, la beauté des décors naturels et des intérieurs en studio, et surtout l'interprétation fascinante et glaciale de Raizo Ichikawa, font de cette nouvelle version du Passage du Grand Bouddha un succès mérité du genre samouraï.

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Puis arrive enfin la version majeure, celle de Kihachi Okamoto, produite par la Toho, Sword of Doom, interprêtée par Tatsuya Nakadai (Tsukue) et Toshiro Mifune.


Texte: Christophe Champclaux

Réalisation Kihachi Okamoto
Scénario Shinobu Hashimoto d'après le roman de Kaizan Nakazato
Musique de Masaru Sato
Photographie de Hiroshi Murai
Producteur
Sanezumi Fujimoto pour Toho

Avec: Tatsuya Nakadai, Michiyo Aratama, Yuzo Kayama, Yoko Naito,
........ Kei Sato et Toshiro Mifune.

Sword of Doom
(Daibosatsu Toge)
1965
118 minutes
Scope N&B

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"Si on compare les deux interprétations du personnage Ryunosuke Tsukue, la mienne est plus sauvage, plus barbare, plus forte que celle de Raizô Ichikawa"
Tatsuya Nakadai

KIHACHI OKAMOTO

....Kihachi Okamoto fut, avec Tomu Uchida, Kenji Misumi et Hideo Gosha, l'un des grands maîtres du second âge d'or du chambara. Réalisateur de nombreux films pour des stars du genre telles que Toshiro Mifune et Shintaro Katsu, Okamoto est resté célèbre pour son Sugata Sanshiro (1977) avec Tatsuya Nakadai, et plus encore pour Sword of Doom, l'adaptation ultime du roman culte de Nakazato.

Okamoto bénéficia, outre de l'expérience des versions passionnantes d'Uchida et Misumi, d'un superbe scénario signé par Shinobu Hashimoto, le scénariste de plusieurs chef-d'oeuvres du Jidai Geki tels que Harakiri, Rebellion ou Les 7 samourais. Photographiée en scope noir et blanc, cette nouvelle version du Passage du Grand Bouddha se distingue par l'interprétation éblouissante de Tatsuya Nakadai, tout autant que par l'extrême violence de ses combats.

La scène finale, marquant le basculement de Tsukue dans l'enfer de sa propre folie, dégage une sauvagerie rarement atteinte sur un écran. Trente cinq ans après sa réalisation, Sword of Doom apparaît plus que jamais comme l'un des joyaux du chambara. Nakadai dira que c' est dans ce film qu'il a eu le plus d'activité en tant que bretteur. La dernière demi-heure de ce film est entièrement consacrée au combat.

Si on compare les deux interprétations du personnage Ryunosuke Tsukue, la mienne est plus sauvage, plus barbare, plus forte que celle de Raizô Ichikawa. Et beaucoup plus pathologique." Tatsuya Nakadai
(propos recueillis par Christophe Champclaux)

TATSUYA NAKADAI

Né à Tôkyô en 1932, Tatsuya Nakadai est avant tout un acteur
de théâtre. Sur scène, il a successivement incarné Hamlet, Jules César, Oedipe, Cyrano de Bergerac et Arsène Lupin.

Simple figurant dans Les 7 samouraïs (1954), Nakadai va bientôt devenir l'un des grands noms du chambara. Il trouve ses rôles les plus éblouissants dans Harakiri (1962) de Kobayashi et Goyokin (1969) de Gosha.

De son propre aveu
Sword of Doom
fut l'une
de ses interprétations
les plus intense.

Nakadai a également
tenu les premiers rôles de Kagemusha (1980) et de Ran (1985) de Kurosawa.

TOSHIRO MIFUNE

Petit fils de samourai, Toshiro Mifune est né en 1920.
En 1947, Kurosawa lui confie le premier rôle dans un film noir intitulé l'Ange Ivre.

Mifune occupera le haut de
l'affiche dans tous les films que Kurosawa tournera jusqu'en 1965.

Mifune obtient également un rôle de première grandeur dans Musashi (1954) d'Inagaki et Rebellion (1967) de Kobayashi.

De sa carrière inter-nationale, il faut retenir Soleil Rouge et
Duel dans le Pacifique.

Disparu en 1998, Toshiro Mifune a figuré dans plus de 170 films. Expert en Aikido (voir la fameuse bagarre de Barberousse), il fut égale-ment 7e dan de Kendo.

YUZO KAYAMA

Fils d'un célèbre acteur, Yuzo Kayama commence sa carrière en tant que chan-teur avant d'être choisi pour le rôle titre dans la série Waka Daisho (Le jeune maître).

Sa carrière cinémato-graphique débute en 1960.
Outre Sword of Doom et
Les 47 Ronins, Yuzo apparaît dans deux films de Kurosawa
Sanjuro et Barberousse, ainsi que dans le mythique Sugata Sanshiro de 1965 dans lequel il tient le rôle titre.

Récemment apparu dans le Thunderbolt de Jackie Chan, Yuzo Kayama a joué dans plus de 70 films depuis ses débuts.

Devenu désormais aussi célèbre que son père, il mène ses deux carrières en parallèle.